Vivre ensemble

On parle beaucoup du « vivre ensemble ». On en parle davantage depuis quelques mois, à propos de la laïcité.

Je vous propose d’élargir la question…
avec la place des plus pauvres dans cet « ensemble ».

Vivre Ensemble

Méconnaissance, peur, rejet…

À vrai dire si on parle tant de laïcité, c’est parce qu’il y a, sous-jacent, la question de la nouvelle place de l’Islam en France et en Europe. On connait mal cette religion, et donc on en tire une certaine peur. Et je ne parle pas seulement d’avoir peur de Daech et des attentats, peur légitime. Je parle de la peur de l’autre, cet être étrange qui ne vit pas comme nous…

On rêve alors d’un vivre ensemble. Mais comme pour les rêves sociétaires précédents, on oublie les personnes et les familles vivant dans l’extrême pauvreté. Pour eux aussi, on a peur de leur façon d’être, si différente… car on ne les connait pas.

Un vivre ensemble a minima ?

Ce rêve du « vivre ensemble » est souvent assez limité.  Du moment que l’autre me laisse tranquille, reste dans son coin, vit comme il veut mais chez lui, ne m’empêche pas de vivre comme je veux,… alors on « vit ensemble ».

Mais le vrai « vivre ensemble » n’est-il pas une rencontre ? Ne nécessite-il pas de se connaître davantage ?  Ne doit-il pas dépasser le simple bonjour posé machinalement si d’aventure on se croise ?…

C’est ce que veulent vivre les espaces de dialogue inter-religieux, que je vous présente régulièrement à travers Marianne et Abraham. Ils sont souvent trop limités aux chrétiens, juifs et musulmans, ceux que l’on appelle (faussement) les gens du livre. Mais ils sont une source d’espoir !
Et pour cela ils mélangent les « spécialistes » (théologiens,  historiens des religions, sociologues…) avec les personnes qui vivent au quotidien leurs convictions…
Le savoir à partager n’est pas que théorie, il est aussi pratique quotidienne !

En parallèle, la rencontre avec les familles vivant l’extrême pauvreté est encore plus difficile. Depuis des siècles on pense qu’elles ne savent rien, n’ont rien à dire. On a des spécialistes de la pauvreté qui, eux, peuvent dire ce qu’il faut faire.

Une telle approche est source d’échec.
Comme pour le dialogue inter-religieux, on a besoin de théories, et plus, on a besoin de la pratique quotidienne de ceux qui vivent ces situations extrêmes. C’est ce que fait, par exemple, un mouvement comme ATD Quart Monde à travers ses Universités Populaires et les actions du « croisement des savoirs ».

Un modèle sociétal à bout de souffle

Nos sociétés  vivent sur des modèles économiques, écologiques, religieux, politiques, pédagogiques,… qui sont à bout de souffle.

Beaucoup de nos concitoyens le reconnaissent aujourd’hui sur le plan écologique.
Certes il a fallu des décennies d’alerte, et une augmentation des catastrophes.
Mais aujourd’hui les mentalités évoluent dans le bon sens.

Or on aurait pu gagner du temps, sur de nombreux points, en écoutant les plus faibles, les plus pauvres, ceux qui savent ce que veut dire vivre dans la boue, sans eau, sans électricité,  dans le froid,… sur des terrains pollués ou inondables… là où les autres ne veulent pas vivre.

Et c’est la même chose sur les autres aspects de nos sociétés…

Une révolution sociétale majeure : la numérisation

La numérisation, la digitalisation… de nos sociétés s’accélère !
La moité des métiers d’aujourd’hui auront disparu dans quelques années.
D’autres apparaissent, nécessitant d’autres connaissances, une autre approche, une autre façon d’apprendre et de partager le savoir…

La relation aux autres , tant personnes qu’organismes, se transforme. Et c’est à tous les niveaux. Ces outils peuvent servir à organiser la rencontre inter-religieuse, à découvrir les richesses humaines de l’autre, …comme ils servent à diffuser la haine et à organiser des attentats.

On aime ou on aime pas, on y aspire ou on en a peur,… qu’importe ! C’est comme un tsunami ! On ne lui demande pas s’il est gentil ou méchant ; il arrive et il balaye tout !

Quelle sera la place des plus pauvres dans cette nouvelle société ?
Va t-on utiliser ces outils pour un progrès collectif ? Ou serviront-ils à exclure davantage ?
Comment leur savoir participera-t’il à la nouvelle circulation des savoirs ?

Un combat global

Tout se mêle et s’entremêle. C’est pour cela que ce blog, centré sur la relation aux autres et le vivre ensemble, mélange des sujets que l’on a trop souvent séparés :
écologie, informatique, numérisation, psychologie, politique, organisation du travail, religieux, sciences, histoire, pédagogie, partage du savoir, exclusion et pauvreté,…

Ce n’est qu’en  réfléchissant à tout cela de façon globale, et en partant du vécu des plus faibles, en croisant le savoir de tous, même de ceux qui semblent ne pas en avoir,… que l’on aura une chance d’avancer.

C’est une démarche  politique, au sens plein du terme, d’organisation de  la cité (et non politicien).

On s’appuie sur la rencontre entre les personnes, symbolisée par les mains colorées au début de cet article, et on renforce tout cela par une approche politique en termes de droits et devoirs pour tous…

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C’est à de telles conditions que l’on donnera une chance à NOTRE avenir et celui de nos enfants…

Partir des plus pauvres

Certains nous disent que rien de bon ne peut sortir des plus faibles. Pire ! Il faut les éliminer. Il est à noter le succès d’un jeu télévisé comme « le maillon faible ». On se souvient de l’annonce rituelle de l’animateur : « Vous êtes le maillon faible, au revoir ! » .

Et l’histoire a produit le pire en terme d’élimination, que ce soit avec les guerres inter-religieuses, ou avec des génocides. Souvenons-nous que les chambres à gaz n’ont pas vu passer que des juifs, mais bien aussi  des handicapés, des homosexuels, des tziganes,.. et autres « maillons faibles » de la soi-disant « race pure ».

À l’inverse  je préfère m’inspirer  de la méthode pédagogique Montessori par exemple. Aujourd’hui elle est surtout utilisée (mais pas uniquement) dans des écoles de milieu aisé. Or d’où vient-elle ?

Médecin,  puis pédagogue, Maria Montessori, a étudié pendant 50 ans les enfants de milieux sociaux et culturels très défavorisés et en difficulté d’apprentissage. Elle s’intéressait aux enfants « difficiles » qui lui donneront l’occasion de mettre au point sa méthode d’enseignement qu’elle reprendra et généralisera à l’usage des autres enfants.

C’est donc en partant de ceux qui sont exclus du système, qu’elle met en place une pédagogie plus positive, valable pour tous.

On peut reprendre une telle approche dans de nombreux domaine de la vie.
Simplement, il faut aller plus loin :
• ne pas « étudier » les plus faibles, mais les écouter et réfléchir, avec eux, à partir de ce qu’ils savent ;
• veiller et se battre, pour que ce que les plus pauvres nous apprennent là, soit vraiment au service de tous, et ne soit pas capté in fine par ceux qui ont déjà la majorité des moyens.

Vaste programme auquel ce petit blog essaye de contribuer…

Michel Lansard

 

Notes

Ma revue de presse sur le dialogue inter-religieux
–> http://www.scoop.it/t/marianne-et-abraham?q=dialogue

Ma revue de presse sur la société numérique
–> http://www.scoop.it/t/gerer-mes-donnes

Le croisement des savoirs avec ATD Quart Monde
–> https://www.atd-quartmonde.fr/?s=croisement+des+savoirs

Le jeu télévisé du maillon faible
–> https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Maillon_faible_(jeu_télévisé)

La pédagogie Montessori
–> https://fr.wikipedia.org/wiki/Pédagogie_Montessori

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