Pourquoi une priorité aux plus pauvres

Dans mes deux précédents billets j’ai évoqué, de façon rapide, la priorité aux plus pauvres. J’avoue que ce n’est pas évident de prime abord. Essayons de clarifier…

Choix

Priorité n’est pas exclusivité

Dans la lutte contre la grande pauvreté, on voit souvent des actions menées uniquement auprès de certaines personnes, ou certains quartiers. Si c’est parfois nécessaire, en particulier dans des situations d’urgence, c’est le plus souvent un risque d’isolement supplémentaire.

Quand je parle donc ici de « priorité », cela ne signifie pas exclusivité.

Casser le tri social que l’on met en avant

C’est fréquent et semble logique, pour cause d’efficacité. On va décider qu’une action (sociale, économique, scolaire,… ) priorisera une partie de la population visée, à savoir ceux et celles qui peuvent « s’en sortir plus vite ».

Le plus souvent on ne précise pas les critères qui font que Robert sera jugé plus « récupérable » que Sophie. Cela relève des intervenants, qui souvent ne le savent pas vraiment eux-mêmes.

Ce qui est certain, c’est que c’est négatif pour la plupart des personnes pour lesquelles on veut agir. Certains  essayeront à tout prix de montrer qu’ils sont dans la bonne catégorie, quitte à casser toute solidarité avec les voisins. La majorité se découragera, pensant que de toutes façons ils ne seront jamais parmi les élus.

Refuser la théorie du ruissèlement par le haut

On entend souvent cela : commençons en haut de l échelle sociale, puis cela va naturellement atteindre ceux qui sont en dessous, puis encore en dessous, etc.

L’histoire nous apprend que cela ne marche pas !

En fait, c’est en partant des plus pauvres que l’on mettra en place des réponses qui seront valables pour tous.

Quelques exemples

Voici deux situations, parmi beaucoup d’autres, qui montrent qu’en priorisant les plus pauvres, les plus faibles,… on peut faire avancer tout le monde…

L’UNICEF et la mortalité infantile

Cet exemple est intéressant car, malheureusement, la mortalité infantile est quantifiable. On peut donc  évaluer le résultat des méthodes choisies.

Pendant des années, la stratégie de l’Unicef visait à essayer de sauver 50% des enfants. Cela peut sembler être du bon sens, face à l’ampleur du problème et les moyens disponibles.

En fait, on ne le revendique jamais, mais cela revient à dire que l’on  accepte, dès le départ, la mort de 50% des enfants ! Cela devient nettement moins acceptable !

ATD Quart Monde est représenté auprès de L’Unicef, comme auprès d’autres instances onusiennes. Au fil des ans, le mouvement a réussi à faire changer l’objectif. Il a été décidé   de viser à rejoindre tous les enfants. Anthony Lake, alors directeur, a voulu savoir si cela marchait et comment cela se passait financièrement. Les chercheurs ont mouliné 180 000 variables. Excusez du peu !

Résultat ? On a sauvé 60 % d’enfants en plus par rapport aux méthodes habituelles !
Et, en prime, c’est plus rentable économiquement !
La priorité aux plus pauvres cela paye, dans tous les sens du terme !

Les coupures d’électricité en France

Couper l’électricité à une famille en difficulté financière, c’est dur pour elle, mais c’est difficile aussi pour les techniciens obligés de le faire.

3 salariés EDF, alliés (bénévoles) ATD Quart Monde se sont battus sur ce plan. Ils ont mis quelques années pour y arriver, mais l’EDF a changé sa façon de faire.
Je n’ai pas la place ici de tout expliquer, mais il est reconnu que les nouvelles méthodes ont permis d’éviter 70% des coupures. Et là encore, en prime, cela coûtait moins cher en terme de gestion !

Conclusion ?

Un tel billet ne suffit pas à argumenter. Il n’est là que pour illustrer cette fameuse priorité aux plus pauvres. Mais on peut voir que :
• ce n’est pas une utopie irréalisable,
• elle  est plus efficace que l’écrémage social,
• elle peut même coûter moins cher,
• et elle permet de faire avancer tout le monde, contrairement au ruissellement par le haut.

Voilà une approche qui peut servir de critère pour choisir entre les différents candidats aux élections, non ?

Michel Lansard

Notes

Unicef
On retrouve cette étude dans « Quand un peuple parle« , page 74 et suivantes.

EDF
Ce résultat est bien détaillé dans le chapitre 2 du livre « Artisans de démocratie« .

Billet précédent sur le même  sujet
–>  http://jautre.com/priorite-aux-plus-pauvres/

Une réflexion au sujet de « Pourquoi la priorité aux plus pauvres »

  1. Pour moi, la priorité aux plus pauvres n’a pas de sens. Dans, les plus pauvres il y a des situations différentes des unes des autres. Je m’explique les personnes sous le seuil de pauvreté ( revenu à moins de 900 euros) et qui s’ajoute un autre manque celui de la socialisation) sont soutenu par bons nombres associations.
    Les personnes touchant juste 900 euros sans manque de socialisation se voit ne pas être une priorité, et c’est là que le problème se pose car même si la personne est bien intégré socialement doit faire face seule pour amélioré son quotidien.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *